Notre « État de la pauvreté en France 2018 »
51% des ménages sont des familles avec enfants dont plus de la moitié de familles monoparentales. Les mineurs réprésentent plus de 40% des personnes accompagnées.
Une précarité « pas que monétaire »
Près de 8 % des ménages rencontrés par les équipes du Secours Catholique vivent au-dessus du seuil de pauvreté fixé à 60% du niveau de vie médian des Français.
« On en reçoit peu mais de plus en plus », précise Pascale Novelli, statisticienne au sein de l’association. Elle y voit deux explications. La première, considère-t-elle, est que « ce seuil de 1000 € est de moins en moins pertinent ». Notamment parce que le prix des biens qui occupent la plus grande place dans le budget des ménages modestes (logement, énergie, transport) augmente plus vite que l’ensemble. « Les personnes qui sont juste au-dessus vont, à un moment donné, devoir arbitrer entre se nourrir, payer leur loyer ou régler leurs factures. »
La seconde explication est que « la pauvreté n’est pas que monétaire ». À Alès, dans le Gard, Anne-Marie Reboul, responsable de l’équipe locale du Secours Catholique, confirme : « Nous rencontrons des gens qui ont de l’argent, mais qui viennent nous voir pour rompre leur solitude. La plus grande des pauvretés que nous touchons, c’est l’isolement. »
Quand le CDI ne protège plus de la précarité
Avoir un emploi en CDI, à plein-temps, et vivre la précarité, c’est possible. Un quart des travailleurs que rencontre le Secours Catholique sont dans cette situation.
Ouvrier dans l’automobile en Picardie, Xavier gagne 2 000 euros par mois. Malgré cela, il a dû demander un coup de pouce au Secours Catholique pour acheter une voiture après que la sienne l’a lâché. « Depuis mon divorce, je ne m’en sors plus. » Ce quadragénaire doit payer une pension à son ex-épouse, qui ne travaille pas, tout en assumant la charge de leurs quatre enfants. « Une fois que j’ai payé la pension, le loyer et les factures, il ne me reste plus que 200 euros pour l’essence, les courses et tout le reste. »
Daniel et Marie-Claude, 50 ans tous les deux, parents de trois enfants, dont deux encore à charge, n’avaient aucune difficulté jusqu’à ce qu’ils décident, il y a quatre ans, d’acheter une maison. « Vu notre budget, nous avons trouvé dans la Somme. » Par sécurité, ils décident de garder leurs emplois en Seine-et-Marne, lui en CDI dans une boulangerie (depuis trente ans), elle en intérim dans une lingerie. Ils font l’aller-retour ensemble tous les jours.
Les choses se sont gâtées depuis que l’agence d’intérim a arrêté de proposer des missions à Marie-Claude, il y a trois ans. « Elle n’a pas retrouvé de travail là où nous vivons. Au bout d’un an, elle est arrivée en fin de droits. Depuis, avec seulement mes 1 800 euros de salaire, on galère », explique Daniel.
Des personnes âgées de plus en plus précaires
« Au fil des ans, la hausse lente mais constante des personnes âgées reçues dans nos accueils est une tendance qui se confirme », explique Daniel Verger, responsable du pôle Études, recherches et opinion au Secours Catholique. Cette hausse de 5 % en sept ans a pour principale cause l’insuffisance de ressources financières des retraités. Les faibles pensions et le minimum vieillesse ne leur permettent pas de faire face au coût de la vie.
« Les carrières fragmentées et la solitude sont aussi causes de cette précarité, ajoute Daniel Verger. D’autres retraités qui sont au-dessus du seuil de pauvreté sont parfois à la limite : certains propriétaires n’ayant pas fini de payer leur crédit, d’autres ayant des problèmes de santé qui, bien que pris en charge, entraînent d’autres dépenses de mobilité ou d’énergie. »
Aujourd’hui, 80% des personnes âgées venant au Secours Catholique vivent seules. Nombreuses sont celles qui recherchent un peu de convivialité, et quelques-unes demandent à être bénévoles.
Des étrangers sans statut légal en grande détresse
Le rapport Statistiques 2017 confirme l’augmentation d’étrangers dans les accueils du Secours Catholique, avec une diminution du nombre d’étrangers régularisés mais une augmentation d’étrangers en attente de statut légal.
Ceux-ci vivent dans une détresse qu’amplifie l’entrave aux quelques droits qui leur sont reconnus. Notamment le droit d’être hébergé sans conditions. « Le 115 des grandes villes, rapporte Claire Sabah, chargée du projet Accueil et droits des étrangers au Secours Catholique, exige certaines conditions pour bénéficier d’un abri d’urgence : être malade, être enceinte ou accompagnée d’enfants de moins de trois ans. »
Dans les accueils, les étrangers apprennent le français, accèdent aux loisirs et à la culture ou au soutien scolaire, et font l’objet d’une écoute attentive. Pour fuir l’oisiveté, rencontrer et aider les autres, souvent ils deviennent bénévoles. Les plus jeunes sont de plus en plus nombreux à s’engager au sein du mouvement Young Caritas.