En Arménie, sensibiliser les travailleurs migrants à leurs droits
« Qui parmi vous va partir en Russie ? » demande Tatevik Bezhanyan, chargée de plaidoyer pour la Caritas Arménienne. Face à elle, sur les vingt-cinq personnes réunies dans la grande salle de la maison de la culture du village d’Anushavan, au nord-ouest de l’Arménie, une quinzaine d’hommes et de femmes lève la main.
Parmi eux, Vachik, 63 ans. « Je vais travailler en Russie chaque année depuis 1984 » indique-t-il. Dans deux jours, le soixantenaire quittera une fois de plus son village pour plusieurs mois pour aller effectuer des travaux de voirie à Moscou. « Je suis fatigué mais je n’ai pas le choix, confie-t-il. C’est difficile de trouver un travail stable ici. »
« Il y a beaucoup de chômage en Arménie, notamment dans les villages ruraux proches des frontières », explique Davit Mosoyan, chargé de projet pour la Caritas Arménienne. Comme Vachik, entre 80 000 et 100 000 travailleurs migrants Arméniens partent chaque année pour trouver un emploi en Russie. En 2023, les richesses créées par cette migration de travail représentaient près de 6% du PIB Arménien.
Je pars avec plus de confiance
Mais depuis plusieurs années, la législation russe en matière de migration s’est durcie. Sur fond de guerre en Ukraine et de mesures protectionnistes, la Russie rend de plus en plus difficiles les conditions d’entrée et de séjour sur son territoire pour les travailleurs migrants.
« Enregistrement sur le lieu de résidence, examens médicaux, empreintes digitales… les Russes sont très stricts envers les travailleurs migrants, poursuit Davit Mosoyan. Nombre d’entre eux sont victimes d’arnaques, de rackets et de contrôles de police arbitraires. Et si leurs dossiers ne sont pas en règle, ils risquent des peines de prison, une interdiction de séjour ou encore un enrôlement de force pour aller se battre en Ukraine. »
C’est dans ce contexte qu’intervient la Caritas Arménienne. Dans le nord de l’Arménie, l’ONG organise des séances de sensibilisation auprès des communautés de travailleurs migrants. Contrat de travail, assurance, passeport… dans le village d’Anushavan, où 70% de la population part travailler en Russie, Tatevik Bezhanyan aborde tous les sujets. « En informant ces personnes sur leurs droits avant leur départ, nous voulons faire en sorte que leur voyage et leur séjour soient sûrs et sécurisés » résume Davit Mosoyan.
Pour Vachik, ces séances de sensibilisation ont leur importance : « J’ai appris des choses que je ne savais pas, confie-t-il. Et je pars avec plus de confiance. »