Inondations en Ardèche : à la rencontre des sinistrés

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Le 17 octobre, le ruisseau qui traverse Limony, en Ardèche, s'est mué en torrent. Une vague d'eau boueuse a déferlé sur une partie du village, sans faire de victime, mais causant de très importants dégâts. Trois mois après les inondations, les bénévoles de l'équipe Urgences France du Secours Catholique rendent visite aux habitants.
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En cette matinée de mi-janvier, le « ruisseau de Limony » porte bien son nom. Le petit cours d’eau qui traverse le village éponyme, pour se jeter dans le Rhône tout proche, s’écoule paisiblement. Peu de courant, de l’eau à peine jusqu’au genou… Difficile d’imaginer qu’il fût à l’origine, le 17 octobre, des terribles inondations qui ont dévasté, en quelques dizaines de minutes, tout un quartier de cette commune ardéchoise. « Ce n’est qu’en regardant les vidéos que les gens nous montrent qu’on réalise l’ampleur de ce qu’il s’est passé ce jour-là », confie Christelle. 

Depuis la veille, cette bénévole du Secours Catholique parcourt le village à la rencontre des habitants. Avec Jean-Charles, son binôme, Christelle fait partie de l’équipe Urgences France, un département du Secours Catholique qui mobilise pendant quelques jours, sur les lieux d’une catastrophe naturelle, des volontaires venus de toute la France et formés à intervenir auprès des personnes sinistrées. « Notre mission est d’aller vers les habitants pour leur demander comment ils vont », explique Emmanuelle Pernot, salariée de l’association qui assiste la coordination du dispositif sur place. « Trois mois après la catastrophe, ça peut surprendre les gens », convient-elle. Mais c’est le principe : venir une fois que tout le monde est parti. 

Quentin, Brigitte et Muriel à Limony
Chez Quentin, cuisinier de profession, dont la maison se situe en bordure du ruisseau.

« Comme l’événement a été médiatisé, il y a eu très rapidement un fort élan de solidarité, raconte Quentin, jeune père de famille et cuisinier de profession, dont la maison se situe en bordure du ruisseau. Des dons ont afflué, des propositions d’hébergement aussi, beaucoup de monde est passé : les pompiers de Grasse (Alpes-Maritimes), des inconnus qui venaient pour une journée aider à déblayer les gravats, les experts, pour l’évaluation des dégâts. Entre nous, également, il y a eu beaucoup d’entraide, on se rendait chez les uns et les autres pour aider à nettoyer. Pendant un gros mois, nous étions dans cette dynamique. » Puis, la vie a repris son court.

Stigmates

Trois mois après l’inondation, le temps semble avoir effacé une grande partie des stigmates de la catastrophe. Mais cette normalité retrouvée n’est qu’apparente. À l’intérieur de nombreuses maisons qui, vu du dehors, paraissent intacts, tout est détruit. Beaucoup de ménages impactés sont encore hébergés ailleurs. 

En cette mi-janvier, Karl, retraité, et Sylvie, aide-soignante en milieu hospitalier, ne sont revenus dans leur pavillon, que le temps d’une matinée, pour nettoyer le jardin. « Après la sidération puis l’état d’urgence qui ont précédé la catastrophe, on est entré dans le temps long, celui des devis et des assurances, explique Sylvie. On prend conscience de ce qui va nous être remboursé et de ce qui reste à notre charge. C’est maintenant qu’on peut évaluer nos besoins réels. Vous arrivez au bon moment », dit-elle à Brigitte et Muriel, les bénévoles du Secours Catholique venues à leur rencontre. 

Les deux sœurs originaires du Var recueillent les besoins matériels du couple : meubles, équipements électro-ménager… Une convention a été signée avec un magasin des environs. Ce dernier s’engage à accepter les bons d’achats donnés par le Secours Catholique aux personnes sinistrées. 

Sylvie et Karl, avec Muriel et Brigitte, à Limony
Sylvie et Karl, dans leur jardin, avec Muriel et Brigitte, bénévoles au Secours Catholique.

Le soutien de l’association n’est pas que matériel. Une écoute et un accompagnement dans la durée, qui seront assurés par l’équipe locale du Secours Catholique, sont également proposés. 

Une initiative bienvenue, assure Sylvie. « Aujourd’hui, on commence à se poser, mais en même temps, on se retrouve un peu seuls, dit-elle. Ça fait du bien d’avoir des gens qui viennent nous voir, nous écouter, prendre soin de nous. C’est vrai que ce qui nous est arrivé nous a marqués, et c’est maintenant qu’on commence à ressentir ce traumatisme. »

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Le ruisseau Limony
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Trois mois après les inondations, le ruisseau Limony a regagné son lit.

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©Christophe Hargoues / Secours catholique
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Le ruisseau Limony
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À certains endroits, les traces de la catastrophe du 17 octobre sont encore visibles, comme cet amoncellement de branches venues de la forêt en amont et portées par la force du courant, décuplée ce jour-là. Ailleurs, des parcelles de terrain complètements désherbées laissent deviner le passage des flots d'eau boueuse.

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inondations Limony
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Quatre-vingt-treize familles ont été touchées par les inondations, trente-sept maisons sont toujours inhabitables. Hébergés temporairement, les propriétaires qui le peuvent reviennent chez eux, sur leur temps libre, pour déblayer les amas de boue et de branchages qui ont recouvert leur terrain.

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Sylvie Muriel à Limony.
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Sylvie et Karl s'étaient rendus sur le pont pour observer la crue, lorsque le ruisseau a débordé et qu'une vague d'eau boueuse a déferlé sur leur maison en contrebas. L'eau est montée jusqu'à 1m20. "Dans la maison, les meubles flottaient. On a retrouvé dans le garage nos arbres fruitiers en pots qui étaient dans le jardin. Ils pèsent pourtant extrêmement lourd. C'est vous dire la force du courant", décrit Sylvie aux bénévoles du Secours Catholique venues lui rendre visite. 

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Muriel et Brigitte à Limony
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De l'extérieur, certaines maisons semblent intacts, mais à l'intérieur tout est à refaire. L'eau a imbibé les murs, infiltré les circuits électriques... Les travaux vont durer plusieurs mois. 

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Limony
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Au village, les esprits aussi restent marqués par la catastrophe. Ce résident n'était pas à Limony le 17 octobre, il est venu précipitamment le lendemain matin. Heureusement pour lui, sa vieille demeure, pourtant en bordure de ruisseau, n'a pas été touchée, grâce à une digue qui la protège. Il a néanmoins été chamboulé par les événements. "Voir le village où on a grandi dans cet état, c'est traumatisant, explique-t-il, en montrant des photos de la commune en partie engloutie par les eaux. Et je connais beaucoup de personnes qui ont subi de gros dégâts. Certaines étaient chez elles et se sont retrouvées bloquées. Elles ont eu très peur." Il ne peut s'empêcher de culpabiliser : "Pourquoi elles et pas moi ?" Et de confier aux bénévoles venues à sa rencontre : "Ça fait du bien d'en parler."

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Limony
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Du 13 au 24 janvier, huit bénévoles de l'équipe Urgences France du Secours catholique ont été mobilisés pour aller rencontrer les personnes sinistrées. Le but : les écouter et recueillir leurs besoins.

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Limony
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C'est désormais l'antenne locale du Secours Catholique qui va prendre le relai dans l'accompagnement des ménages qui en ont exprimé le besoin.

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Nom(s)
Benjamin Sèze
Fonction(s)
Journaliste
Nom(s)
Christophe Hargoues
Fonction(s)
Photographe
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