Un dimanche de partage
« Je crois bien que c’est la première fois que je ne parle pas pendant un repas. » Il est 13 heures passées, en ce dimanche d’automne ensoleillé, lorsque le groupe sort de table après un repas en silence, comme c’est la règle au carmel de Mazille. « Et les sœurs font ça midi et soir ! Moi je ne pourrais pas, j’ai trop besoin de parler ! » poursuit Stéphanie, déclenchant un rire général.
L’humour est quelque chose de très important pour cette mère célibataire. Sans emploi, elle est membre du Secours Catholique de Tournus depuis deux ans. « J’aime ces journées, poursuit Stéphanie, on partage entre nous, on échange, on réfléchit... » Et puis il y a la messe, une chose nouvelle pour elle : « Depuis que j’y vais, ça me vide. J’oublie tous mes soucis. Je les retrouverai ce soir en rentrant, mais ça m’apaise. Et puis ici il n’y a pas de différence, on ne se juge pas, c’est ça qui est bien ! »
C’est tout l’enjeu de ces journées de partage, explique Hélène Marcaud, bénévole au Secours Catholique de Cluny et cheville ouvrière de ce rendez-vous. Chaque année, quatre rendez-vous sont organisés. « Chacun partage ce qu’il vit tous les jours, en lien avec le texte de l’Évangile du jour. Certains parlent de leurs souffrances, de leur passé douloureux... Il y a des rires, des pleurs, on se soutient et on prie ensemble. C’est un moyen de se ressourcer. »
Ce matin, avant la messe, la vingtaine de participants s’est répartie en trois groupes, afin de réfléchir et préparer les intentions de prière qui seront lues pendant la cérémonie. Dans le premier groupe, Alexandre, un Arménien, sert de traducteur à Sergueï et sa femme Zina, qui parlent le russe.
Le Secours Catholique de Cluny accueille en effet de nombreux demandeurs d’asile, et les aide dans leurs démarches. C’est le cas également de la famille de Claudia, dont le père a été emprisonné et torturé au Kosovo. La jeune fille a confié sa prière durant la messe, « pour toutes les personnes qui souffrent encore en prison, pour les personnes torturées... ». L’adolescente a également remercié « pour ses nouveaux amis en France ».
En début d’après-midi, le groupe a pu visiter la ferme du carmel et découvrir l’élevage de moutons. Encore un moyen de lâcher prise pour Patricia, une autre bénévole au Secours Catholique de Tournus. « Une journée au calme, dans un cadre comme celui-là, en pleine campagne, c’est génial ! Les gens offrent un autre visage, et chacun d’entre nous retrouve le sourire ! » témoigne cette mère, elle aussi au chômage. C’est d’ailleurs la verdure qu’elle a décidé de représenter lors de l’atelier de peinture sur verre, la dernière activité de la journée, avant le goûter en commun que le groupe a partagé avec quelques sœurs du carmel, histoire d’échanger une fois encore et de repartir plus fort pour affronter la grisaille du quotidien.