Distribution alimentaire à Calais : le Secours Catholique interpelle le président Macron
Lettre de Véronique Fayet au Président de la République
Paris, le 17 septembre 2020
Monsieur le Président,
Comme de très nombreuses associations, nous avons été profondément choqués en découvrant l'arrêté préfectoral du 10 septembre qui interdit « la distribution gratuite de boissons et de denrées alimentaires» sur un périmètre conséquent de la ville de Calais.
Signé par le préfet du Pas-de-Calais, sous l'impulsion du ministre de l'Intérieur, cet arrêté vient heurter des valeurs et des préceptes au fondement même de notre société.
« J'avais faim et vous m'avez donné à manger »
Pour le Secours Catholique, et bien au-delà des cercles chrétiens, ce passage des Évangiles n'est pas une référence lointaine, mais bien le socle fondateur d'une éthique qui met les plus pauvres au cœur de la foi et de l'action, qui appelle chacune et chacun à la charité, à la solidarité, à la fraternité.
Une éthique reposant aussi sur un autre passage des Évangiles, « ce que vous faites au plus petit d'entre les miens, c'est à moi que vous Je faites », par lequel le Christianisme apporte cette exigence d'égale dignité et d'égale valeur de toute personne, exigence qui a inspiré toutes les philosophies laïques proclamant les droits de l'Homme et le principe d'Egalité. C'est le principe de fraternité, pourtant consacré par le Conseil Constitutionnel en 2018 qui est bafoué !
Cet arrêté s'en prend également à la liberté d'association. Car en le justifiant par le fait que les distributions alimentaires effectuées par les services de l'État ou ses acteurs « mandatés » sont suffisantes, le ministre de l'Intérieur préempte et confisque pour l'État toute action « gratuite » relevant de la générosité, de l'aide humanitaire, de la solidarité citoyenne. Étrange conception de la démocratie ! Étrange oubli de la nécessaire complémentarité qui existe de tous temps entre l'action sociale publique et l'entraide individuelle et associative !
Vous le comprenez, cet arrêté n'a rien d'anodin. Il a une dimension qui dépasse largement la question des politiques d'immigration et d'asile ou de la situation complexe que pose depuis plus de 20 ans la présence des exilés sur tout le littoral franco-britannique.
Nous tenons, Monsieur le Président de la République, à vous exprimer la portée dévastatrice d'une telle mesure, et vous demandons d'intervenir pour qu'elle soit abrogée dans les meilleurs délais.
Veuillez recevoir, Monsieur le Président de la République, l'assurance de ma parfaite considération.