« Laudate Deum » : un appel à saisir pour que vive la Création
À l’occasion de la dernière Conférence sur les changements climatiques qui s'est tenue à Dubaï (COP28), le pape François adressait un message fort aux catholiques et à la communauté internationale. Le texte, « Laudate deum » (« Louez Dieu »), alerte sur l’urgence climatique et évoque le « point de rupture » (paragraphe 2) que la planète pourrait bientôt atteindre.
« Cette exhortation est consacrée à l’écologie intégrale, dans la lignée de l’encyclique Laudato si’ publiée en 2015, rappelle Benoît-Xavier Loridon, directeur de l’Action et du plaidoyer international du Secours Catholique. Le pape soutient que notre monde ne traverse pas seulement une crise environnementale mais une crise sociale. C’est ce que le Secours essaie de mettre en avant dans son plaidoyer auprès des institutions, pour faire comprendre le lien entre le dérèglement climatique et l’augmentation des inégalités. »
Dans Laudate Deum, le pape dénonce la logique des « grandes puissances économiques, soucieuses du plus grand profit au moindre coût » (paragraphe 13). Selon lui, elles détruisent la nature et renforcent les inégalités, car elles construisent un monde qui trompe les plus fragiles et les met à l’écart.
Pour Benoît-Xavier Loridon, le message du pape permet donc de donner de la légitimité aux mobilisations du Secours Catholique. « Au Congo, par exemple, nous craignons l’impact négatif du projet de compensation carbone mené par TotalEnergies, détaille-t-il. Nous pensons que ce projet, destiné à absorber les émissions polluantes des activités de Total, peut entraîner le déplacement des populations et menacer leur sécurité alimentaire. »
Un levier de la transition écologique
En France, le Secours Catholique s’inspire de la philosophie du pape pour faire de la lutte contre la précarité un levier de la transition écologique. « Les études scientifiques montrent que le dérèglement climatique affecte d’abord les plus précaires, appuie Daphné Chamard-Teirlinck, chargée de Mobilité durable. Nous avons donc décliné une feuille de route sur l’alimentation, le logement et la mobilité durables. Sur la question du logement par exemple, certaines personnes n’arrivent plus à payer leurs factures d’énergie parce que leurs bâtiments sont mal isolés. Nous sommes partenaires du programme « 1DigneToit » qui trouve des financements pour rénover les logements des personnes en situation de précarité et réduire leur facture. »
Le Secours catholique encourage aussi des initiatives écologiques qui permettent de rompre l’isolement social, comme les ateliers de réparation de vélos, et la distribution de paniers solidaires faits par des producteurs locaux. Dans le Val d’Oise, en Île-de-France, le vice-président de la délégation Mattieu Guionnet mentionne notamment les Vesti’boutiques, « des boutiques de vêtements de seconde main, à bas prix, qui permettent d’éviter la surconsommation et qui s’adressent à tous les publics pour favoriser la mixité sociale. »
Mattieu Guionnet a été sensible à la dimension spirituelle du « Laudate Deum » du pape. Dans la dernière partie de son exhortation, François appelle les catholiques à trouver une motivation dans la foi pour changer leur mode de vie en faveur de l’environnement. Et il « encourage les frères et sœurs des autres religions à faire de même » (paragraphe 61).
« Le Val d’Oise est un département très hétérogène, et où les catholiques, les musulmans et les hindous cohabitent, explique Mattieu Guionnet. À l’été 2022, notre délégation a participé au voyage de l’Espérance du Secours [un temps de rencontre et de retraite spirituelle à la Cité Saint-Pierre de Lourdes]. Nous étions environ 200, musulmans, athées ou catholiques. Et nous avons vécu tous ensemble cette conversion des cœurs dont parle François. »
Dans « Laudate Deum », le pape établit un lien profond entre Dieu et la nature. Il évoque le souffle de Dieu « dans une feuille, dans un chemin, dans la rosée, dans le visage du pauvre » (paragraphe 65). « François nous enseigne que la conversion à l’écologie doit se faire avec la participation des personnes les plus pauvres, conclut Hervé Perrot, aumônier général du Secours Catholique. C’est tout le cœur de notre mission : aller vers une société plus juste en écoutant le cri des pauvres. »