Verser 8 milliards d’euros par an d’ici 2025 aux pays vulnérables pour faire face aux changements climatiques, et si on essayait ?
Inondations, cyclones, montée des eaux, augmentation des températures et épisodes de sécheresse… De l’Amazonie au Bangladesh, en passant par Madagascar, des populations se voient contraintes de migrer ou de modifier leur mode de vie du fait de l’intensification des événements extrêmes.
Or nombre d’entre elles se nourrissent grâce à ce qu’elles cultivent et dépendent intimement de leur environnement pour vivre.
En 2009, à la Conférence des parties (Cop) de Copenhague, les pays développés s’étaient engagés à verser 100 milliards de dollars par an pour aider les pays les plus vulnérables à faire face aux changements climatiques.
L’idée était de mobiliser des fonds pour financer leurs politiques d’adaptation aux changements climatiques. Cette promesse avait été réitérée lors de l’accord de Paris en 2015. À ce jour, ce montant n’a pas été atteint.
- 600 millions de personnes supplémentaires souffriront de la faim en 2080 en raison des changements climatiques*.
- 143 millions de personnes quitteront leur habitat en raison des changements climatiques en 2050, soit 3 % de la population du globe**.
Sources : *Programme des Nations Unies pour le développement, **Banque mondiale.
Notre témoin : Jeannot Benet, ingénieur agronome, Haïti
Les pays du Sud vivent les changements climatiques comme une injustice, comme en témoigne Jeannot Benet, ingénieur agronome, chargé de projet pour Concert’action, partenaire du Secours Catholique en Haïti.
« En Haïti, nous remarquons des changements que nous n’avions pas auparavant. Il fait plus chaud de manière générale. On trouve moins de démarcations entre les saisons, il n’y a plus d’hiver, ni d’été marqués. Et puis, avec la montée du niveau de la mer, certaines zones du littoral sont plus facilement inondées. Surtout, la pluviométrie varie, à tel point que les paysans haïtiens ont des difficultés à prévoir les périodes de plantation.
Par exemple, de décembre à mars, c’est habituellement la saison sèche. Mais cette année, nous avons eu des pluies diluviennes début mars. La météo devient difficile à prévoir. »
Jeannot Benet, ingénieur agronome, Haïti
« C’est vrai que les Haïtiens sont responsables du déboisement de leur pays. Mais ils ne sont pas responsables de l’accroissement des gaz à effet de serre. Nous subissons les conséquences des changements climatiques, c’est injuste.
Je crois au principe du pollueur payeur et les pays du Nord pourraient nous aider à planter des arbres ou à pratiquer de nouvelles cultures adaptées aux changements climatiques. Nous avons besoin de financements pour faire face à cela. Mais je pense que, parallèlement, il faut aussi des financements pour atténuer l’augmentation des gaz à effet de serre et empêcher que la situation ne s’aggrave. »
Aux yeux du Secours Catholique, les conséquences du réchauffement global appellent une réponse systémique dans laquelle les principaux pollueurs assument leur juste part de l’effort. Dans cette période électorale, l’association invite les politiques à s’attaquer aux causes des changements climatiques, en prenant des mesures efficaces pour réduire les émissions françaises de gaz à effet de serre dans l'objectif de contenir le réchauffement sous les + 1,5°C.
Le Secours Catholique invite également les politiques à aider les pays du Sud à réduire leurs émissions et, surtout, à faire face aux conséquences de ces changements climatiques. Car il est nécessaire d’indemniser les pays qui subissent pertes et dommages. La communauté internationale s’est engagée à verser 100 milliards de dollars annuels par an. Concrètement, la France doit fournir 8 milliards d’euros par an d’ici 2025 aux pays vulnérables, contre 6 milliards aujourd’hui.
Découvrez toutes les recommandations du Secours Catholique pour une transition écologique juste
L’expert : Alexandre Magnan, co-auteur du dernier rapport du Giec
Alexandre Magnan est chercheur « adaptation au changement climatique » à l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri). Il est l’un des auteurs du dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) sur les vulnérabilités et les capacités d’adaptation à la crise climatique.
Selon lui, la France doit prendre sa part dans le financement des politiques d’adaptation aux changements climatiques des pays du Sud. La France a une responsabilité historique vis-à-vis de ces pays, en particulier à l’égard de ceux qu’elle a colonisés par le passé.
Dans cette vidéo, Alexandre Magnan explique que cet argent pourra par exemple permettre d’aider des paysans à lutter contre les effets des sécheresses ou des inondations, ou encore d’accompagner les populations pour se replier dans des zones plus sécurisées en raison de l’élévation du niveau de la mer.
Il affirme par ailleurs en quoi les politiques de réduction des gaz à effet de serre, mais aussi les politiques de réduction des inégalités sociales, vont permettre d’atténuer les effets des changements climatiques pour les plus pauvres.
Consulter le rapport du Secours Catholique « Soutenir la transition agroécologique », 2018.