Tanja, du Haut-Karabakh : « J’ai perdu ma patrie »
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Je viens d’Artsakh* et j’y ai toujours vécu. C’est le plus bel endroit de la Terre. Là-bas j’étais comptable et j’avais ma propre maison. C’était une vie parfaite et idéale. Mais suite à l’offensive azerbaïdjanaise de septembre 2023, j’ai dû tout quitter. J’ai laissé derrière moi les tombes de mes ancêtres. Mon mari et moi sommes partis sans rien pour nous réfugier en Arménie. C’est comme si je n’avais plus de foyer, car j’ai perdu ma patrie. Nous vivons désormais dans le village d’Anushavan, au nord du pays et proche de la frontière turque, dans une vieille maison humide et pleine de souris que nous prête le gouvernement. La vie ici est difficile car il n’y a pas de travail. En faisant le ménage dans des bâtiments administratifs, je gagne à peine de quoi acheter à manger. De plus, j’ai peur de vivre près des frontières et de subir une nouvelle attaque de nos ennemis : je ne veux plus voir de combats.
Je suis obligée de partir.
C’est pour ces raisons que je veux partir en Russie. Mes deux fils et ma sœur vivent là-bas et les salaires sont meilleurs. Je ne suis pas heureuse d’y aller car je sais en Russie, les migrants ne sont pas bien traités. La législation y est très stricte et beaucoup d’immigrés subissent des rackets ou des arnaques de la part de l’administration. Mais je suis obligée de partir. Alors pour préparer mon départ, j’assiste aux séances de sensibilisation de la Caritas arménienne pour les travailleurs qui migrent vers la Russie. J’y apprends beaucoup d’informations utiles sur les règles à respecter ainsi que sur mes droits. Je pense que grâce à cette aide, je pourrai me rendre là-bas sans encombre. Mais je n’oublie pas l’Artsakh et j’espère pouvoir y retourner un jour. Avant de fuir, j’ai écrit sur le mur de ma maison : « Je reviendrai. »
*Artsakh est le nom arménien du Haut-Karabakh
En Arménie, sensibiliser les travailleurs migrants à leurs droits