Tatiana : « Tout ce que ces femmes ont vécu, je le vis avec elles.»
« Des femmes en danger, j’en croise quotidiennement. Comme cette veuve mère de deux enfants, harcelée par son beau-frère, et que sa propre famille voulait remarier de force. Notre association l’a aidée à se mettre à l’abri. Tout ce que ces femmes ont vécu, je le vis avec elles. C’est comme mon malheur. Elles ont besoin d’amour et je leur en donne .
J’ai grandi dans une famille aimante d’origine arménienne en Tchétchénie, j’avais déjà du caractère et je défiais l’interdiction pour les filles de faire du vélo. J’en faisais en cachette, souvent j’étais punie après . J’ai aussi été marquée par un crime “d’honneur” commis dans mon village : C’était injuste à mes yeux. Et puis en 1995, mon père et mon frère ont été tués par des militaires russes. La mort de mon père a changé ma vie. J’aurais, sinon, sûrement été obligée de me marier. À 20 ans, j’ai vu l’horreur et c’était inacceptable !
J’ai ensuite étudié la psychologie et puis j’ai décidé de panser les blessures des femmes en fondant mon association en 2005. J’ai constaté que les violences exercées contre les femmes augmentent dès 2007 (70 % des femmes seraient concernées !), avec la situation dramatique de l’après-guerre et un chômage à son paroxysme (les hommes, désemparés, s’en prennent d’autant plus aux femmes).
Sous couvert d’informer sur la santé maternelle et infantile, les maisons de l’association sont en fait un lieu d’écoute pour les femmes. Elles leur apportent une aide psychologique et juridique. Nous menons aussi des campagnes d’information dans des écoles. Bien sûr, cela reste difficile de changer les mentalités en Tchétchénie Mais sinon, pourquoi vivre ? Le combat contre l’injustice, c’est ma vie. »
*Nous en taisons le nom pour des raisons de sécurité.