Depuis sept ans, le quartier Capuche de Grenoble possède une épicerie pas tout à fait comme les autres, cofondée par le Secours Catholique. À Épisol, les prix varient en fonction des revenus de chacun et une dizaine d’employés en insertion reprennent goût au travail en mettant en pratique les valeurs de proximité, de nourriture de qualité et de solidarité.
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« Épisol n’est pas une épicerie sociale mais une épicerie solidaire ouverte à tout le monde, avec deux tarifs préférentiels proposés aux personnes à faibles revenus », explique Julie Baume-Gualino, directrice de l'épicerie. Épisol a été fondée en 2015 par le Secours Catholique, le diaconat protestant et le CCAS de Grenoble. Au fil des ans, s’y sont greffées une épicerie mobile et la distribution de paniers solidaires. Depuis janvier 2021, la structure est aussi chantier d'insertion. « Il fait notre force et notre singularité », souligne Julie Baume-Gualino. La structure compte 19 salariés au total : 10 en insertion, 2 mécénats de compétence, 2 ou 3 services civiques par an, et 5 en CDI. « Épisol est au carrefour d’enjeux majeurs : solidarité, insertion, écologie et prix adaptés », conclut la directrice.
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8H30
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Marché d’intérêt national (MIN) de Grenoble. Sous la grande halle, les transactions touchent à leur fin alors que l’équipe de bénévoles d’Épisol collecte les invendus et trie les fruits et les légumes destinés au rebut. Hervé, 59 ans, en mécénat de compétence, encadre le groupe. « 60 % de la marchandise collectée est sauvée de la destruction, explique-t-il. Une bonne partie va rejoindre la boutique pour être mise en vente. Une autre, plus fragile, va être livrée à des associations qui la transformeront en confiture ou en conserves. »
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10H
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Parmi les bénévoles, des migrants sans papiers aimeraient trouver leur place dans notre société. « Je serais heureux d’avoir un emploi. Il y a beaucoup de postes non pourvus ici. Dans mon pays je conduis des camions. Je pourrais facilement faire cela ici », confie John, Nigérian de 37 ans, qui, avec ses amis, charge le tri du jour dans le véhicule d’Épisol que conduit Jean-Louis, bénévole de 71 ans. Cet industriel à la retraite vient de faire la tournée des supermarchés et des boulangeries pour collecter les produits atteignant la date limite de consommation. La collecte du MIN chargée, cap sur Épisol, à dix minutes de là.
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10H30
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Épisol s’est installé en 2015 dans ce quartier populaire, à l’emplacement d’une ancienne épicerie de proximité. Sur l’arrière de la boutique, Jean-Louis vient de décharger la marchandise. Quatre employés, bénévoles ou en insertion, apprêtent les produits pour leur mise en rayon. Elena, d’origine roumaine, panache des barquettes de légumes et de fruits pour 0,30, 0,50 ou 1 euro. « Ici, on apprend tous les jours quelque chose, dit-elle. Nous sommes tous polyvalents, nous trions, nettoyons, mettons en rayon, tenons la caisse. J’ai passé plusieurs mois ici et la semaine prochaine, je pars travailler à plein temps dans un supermarché. »
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11H
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Dans le magasin, une dizaine d’habitués attendent les légumes et les fruits arrivés du MIN. Un grand-père explique que c’est ici le meilleur plan pour bien manger à petit prix. Il tient sa carte d’adhérent à la main, la même carte que sa voisine, Marie-José, esthéticienne à la retraite qui confie : « Nous payons le tarif le plus bas parce que nous sommes pauvres. J’ai élevé quatre enfants toute seule et après avoir payé mon loyer il ne me reste que 200 euros par mois pour régler mes factures et acheter à manger. Heureusement qu’il y a cette boutique pour nous aider. Et puis ici ils sont tous adorables, toujours le sourire. »
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12H
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L’activité du magasin bat son plein. Entre les rayons, les employés s’affairent sous la supervision bienveillante de Françoise, responsable du magasin, et de Dominique, encadrante technique des employés en insertion, qui trouve ici « une richesse de relations qui [lui] permet de rester motivée ». Dans l’arrière-boutique, Célia, bénévole, prend l’adhésion de Mauren, étudiante colombienne, et de Camille, artiste peintre. En apprenant qu’elle bénéficiera des meilleurs tarifs, Camille se réjouit : « Avec ce que je vais économiser sur ma nourriture, je pourrais m’acheter du matériel de peinture. »
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12H30
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À l’heure du déjeuner, Catherine Labrunie, présidente d’Épisol et bénévole du Secours Catholique, passe saluer les employés. Elle explique qu’Épisol « vise les travailleurs pauvres qui n’ont pas droit aux distributions alimentaires. Nous leur permettons d’accéder à une alimentation de qualité grâce à la tarification différenciée ». De fait, Épisol touche une frange importante de la population de ce quartier « difficile ».
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14H
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Tandis que le magasin continue de servir sa clientèle, à l’arrière de la boutique, Jean, 24 ans, architecte de formation qui a « bifurqué pour donner un autre sens à [s]a vie », apprête le camion-épicerie d’Épisol. Cinq fois par semaine, il part garer « La Mobile » (version itinérante d'Épisol) au cœur d’un quartier populaire. Cet après-midi, il est à Pont-de-Clay, en banlieue grenobloise, où l’attendent une poignée de personnes, parmi lesquelles Marie-Rose, 80 ans, qui vient toutes les semaines. « Je n'ai pas les moyens d’acheter ma nourriture dans les magasins, dit-elle. Cette épicerie m’aide beaucoup. C’est aussi le seul moment de la semaine où je rencontre des gens. »
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15H
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Fatima, 37 ans, et son fils de 10 ans viennent aussi toutes les semaines. « Nous vivons avec l’Allocation adulte handicapé de mon mari, dit-elle. Je viens parce qu’ici les produits bio sont cinq à six fois moins chers qu’ailleurs. » Entre plusieurs clients descendus des tours avoisinantes pour se ravitailler, Jean explique : « Nous nous différencions des autres actions sociales parce que nous sortons de la stigmatisation. Nous offrons le choix comme dans tout commerce. Nous conservons le côté social puisque beaucoup viennent discuter. Mais nous sommes avant tout une épicerie solidaire. »